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“Les flux migratoires se sont stabilisés” | Ouest-France

Entretien avec Yves Pascouau

Quelle est la situation des flux migratoires vers l’Europe ?

 

Par rapport à la crise de 2015, ils se sont stabilisés. Les pays européens et l’Union ont paru réagir en retard, lorsque plus d’un million de personnes sont arrivées pendant l’été. Aujourd’hui, l’ensemble des mesures mises en oeuvre pour la sécurisation des frontières fiat que les arrivées sont à leur niveau le plus bas depuis 2013. La situation est revenue à la normale. En revanche, sur les moyens utilisés, en matière de droits et de valeurs, on peut s’interroger. Notamment sur l’accord avec la Turquie.

 

Les ONG contestent l’arrêt de l’aide humanitaire en Méditerranée…

Oui, il y a eu une fermeture brutale pour répondre à des objectifs politiques, sur impulsion de l’Allemagne notamment Et juridiquement, les moyens sont contestables. L’idée que la Turquie puisse être considérée comme un pays tiers “sûr” est à discuter. Mais plus encore avec la Libye. Faire traiter la question migratoire par un Etat failli, dans lequel les conditions de vie relèvent de l’enfer, pose question.

 

Dès 2015, la Commission européenne a régi vite pour mutualiser l’urgence. En vain. Comment sortir du blocage entre les Etats ?

 

La crise, il y a quatre ans, a révélé une situation que personne n’avait vu arriver. C’est la différence très profonde qui existe entre les pays d’Europe centrale et orientale et ceux de l’Ouest. On n’a pas compris, ou saisi, l’écart de perception du phénomène migratoire.Ces pays ont longtemps été soumis à des régimes (communistes) qui les enfermaient, et la question de la mixité, de la multiculturalité de fait, c’est pas habituelle. L’idée de voir arriver des personnes venant d’un autre continent est excessivement anxiogène dans ces sociétés, et cela a été utilisé dans les discours politiques.

 

Il y a, en outre, une crise démographique dans ces pays…

Oui, ils vivent un problème majeur d’émigration. Depuis 2004, des millions de personnes ont quitté l’Europe centrale et orientale vers l’Europe de l’Ouest. Ils doivent faire appel à une main-d’oeuvre étrangère, notamment d’Ukraine, de Russie, de Moldavie. Il y a là un vrai fossé.

 

Comment sort-on du blocage ? Une politique migratoire à l’échelle européenne est-elle envisageable ?

J’aimerais le savoir. C’est compliqué, les oppositions sont profondes, il va falloir attendre que tout cela se calme. Pour se mettre autour d’une table et comprendre que c’est nécessairement une politique européenne qu’il faut bâtir. Pour se projeter à vingt, trente ou quarante ans, pour anticiper les grandes questions de mobilité humaine. Elle va continuer et il va falloir la gérer cette mobilité.

 

Recueilli par Laurent Marchant.

 

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